Choisir une posture adaptée à la situation pédagogique

Problématique

En tant qu'éducateurs, nous sommes peut-être plus habitués à nous positionner en tant qu'experts, de porteurs de savoirs. Cette posture est pertinente, mais dans une perspective constructiviste, elle prend tout son sens pour l'apprenant à la lumière des expériences évoquées au terme d'un processus pédagogique complexe, durant l'étape d'institutionnalisation. Outre cette position d'expert, il y a plusieurs autres postures à prendre en considération.

Objectif

Pour l'éducateur : choisir une posture adaptée à la situation pédagogique

Pour l'apprenant : se sentir libre de parler de manière authentique, se sentir en sécurité pour apprendre, être conscient de l'apprentissage principal en jeu dans une situation problématique.

Postures à considérer dans une approche socio-constructiviste

Quelle que soit la situation pédagogique, il nous semble important de rester impartial, c'est-à-dire de ne pas orienter l'apprenant vers le point de vue de l'éducateur sur la question du bien-être animal, de ne pas essayer de le convaincre mais plutôt de lui montrer toutes les controverses en jeu. L'éducateur ne révélera ses propres opinions que pour donner l'exemple, ou pour répondre aux demandes des participants. Mais en aucun cas, ces opinions ne doivent servir de modèle à suivre. L'éthique que l'enseignant exprime est une éthique pédagogique, basée sur l'acceptation de l'expérience subjective de l'élève.

Cette posture-clé implique l'adoption de différents types de postures au cours du processus pédagogique

La posture de facilitation vise à permettre l'expression des conceptions, en confrontant les opinions des apprenants dans une atmosphère équitable. Remettre en question et permettre d'approfondir les points de vue de chacun nécessite de ne pas tenir compte de ses propres normes, de son éthique et de son point de vue concernant les questions de bien-être animal.
La posture de médiation est particulièrement sollicitée lorsque les étudiants ont exprimé des points de vue contradictoires, afin d'aider la personne à prendre en considération ses divergences de manière constructive.

Accueillir les émotions de la personne, lui permettre de les ouvrir, fait partie d'une posture d'accompagnement, amenant le professeur à aider l'apprenant à s'orienter. Tout jugement porté sur ses choix risquerait de disqualifier son expérience subjective.

Mais l'enseignant doit aussi permettre l'expression de leurs propres difficultés, s'il en existe, en continuant sereinement, non pas à incriminer le groupe, mais à témoigner de leurs propres émotions et désirs. Cette posture est une invitation pour l'apprenant à faire de même, à se permettre d'être authentique. Elle conduit aussi généralement à une régulation du groupe en permettant aux participants de ressentir le même malaise conduisant au changement.

Écueils et recommandations

En tant qu'enseignant, il est important d'être clair sur la posture à adopter en fonction de la situation pédagogique, en évitant la posture d'expert lorsqu'on mène un débat, ou en évitant d'orienter l'apprenant plus que de l'accompagner.

Exemples et témoignages

"Le premier test de l'approche didactique d'Anicare qui a été réalisé avec des étudiants vétérinaires en Belgique a été assez décevant pour l'animateur. En effet, les étudiants n'ont pas présenté la motivation attendue pour participer au débat. Après le débriefing, nous avons identifié plusieurs obstacles. En raison de la place qu'il occupait dans la salle (assis sur une chaise haute à l'extrémité de la table devant le tableau noir), de la situation/problème choisi (cas pratique avec une seule solution), l'animateur s'est positionné comme un expert".

"Lors d'un atelier avec des enseignants de zootechnie, les participants ne savaient pas s'ils pouvaient partager avec les apprenants leur propre point de vue éthique sur certaines pratiques professionnelles, et comment le faire sans se sentir trop exposés. Un enseignant a témoigné qu'il voulait être impartial avec ses apprenants, mais qu'il devait en même temps donner son propre avis sur l'écornage des veaux. "J'ai lu des articles de recherche, j'ai observé des éleveurs avec leurs animaux, j'ai écorné, et pour moi, les veaux souffrent pendant longtemps. Il m'est difficile d'accepter cela, même si je dois vous enseigner de telles pratiques". Il a permis aux étudiants de donner leur propre expérience, sans faire de prosélytisme, sans avoir besoin de justification pour tenter de prouver un point.
Le mythe de la neutralité du professeur s'est effondré. Un enseignant peut exprimer sa propre opinion sans prendre une position élevée et sans essayer de convaincre. Finalement, la conclusion de la discussion avec les enseignants est venue sur la légitimité. Que signifie être légitime ? D'être expert en matière de connaissances ? Ou dans votre capacité d'enseignant, de gérer une discussion, un débat ?"

"J'ai souvent eu des problèmes avec les fils d'éleveurs. Peu importe le nombre de pratiques vertueuses que je leur montrais, ils n'arrêtaient pas de dire : "Oui, mais mon père, il ne fait pas ça comme ça." Ils ne se remettent pas en question. J'ai préféré travailler avec des novices. Mais maintenant, je fais en sorte que les étudiants échangent entre eux, sans intervenir, et j'observe qu'ils acceptent la différence".